29/03/2008

"Novartis contre l'Inde" : quelle affiche !

40 millions de malades du Sida dans le monde, dont seulement deux millions ont accès à la trithérapie. C’est pour augmenter les chances de survie des malades restants, la plupart en Afrique, que se battent les ONG comme Médecins sans frontières. Mais pour pouvoir fournir le traitement approprié à ces patients sans ressources, les associations doivent pouvoir acheter des médicaments à bas coût. En l’occurrence des génériques, dont la majorité sont produits en Inde. Ce pays a développé une industrie pharmaceutique puissante en copiant les formules chimiques des médicaments occidentaux à partir des années 1970. Mais depuis son adhésion à l’Organisation mondiale du commerce, l’Inde doit respecter les brevets déposés par des grands groupes mondiaux comme le Suisse Novartis.

Marcel Schüpbach, réalisateur pour la Télévision Suisse Romande, s’est intéressé à la question de la production des médicaments à l’occasion d’un procès intenté par Novartis à l’Inde. Le problème vient du Glivec, seul traitement existant contre le cancer du sang, dont Novartis veut breveter une nouvelle version. L'Inde refuse de reconnaître ce brevet, considérant qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle molécule. Et le pays peut ainsi continuer à produire ce médicament sous sa forme générique. La victoire de l'Inde contre Novartis, connue après la fin du tournage, constitue a priori une bonne nouvelle pour les ONG qui achètent des médicaments, car un succès de Novartis aurait créé un précédent.

Mais la question est complexe, car les brevets rapportent aux industries pharmaceutiques de l'argent qui peut être réinvesti dans la recherche et le développement de nouveaux médicaments. Sauf que les investissements consacrés aux maladies dites "négligées", concernant principalement l'Afrique, ne représentent que 2% du chiffre d'affaires de Novartis.

Le réalisateur de "Novartis contre l'Inde" s'est justement intéressé au sujet pour sa complexité, considérant qu'il n'y a "pas de bons ni de méchants", que "les requins sont des deux côtés". Ainsi l'entreprise indienne Cipla, qui fournit 85% des médicaments génériques utilisés par MSF au Malawi : elle prétend faire à la fois du business et de l'humanitaire, tout comme Novartis. Il semble surtout que "l'industrie pharmaceutique indienne fait peur à l'occident" car elle est en pleine expansion. Le film conclut que la solution pour fournir le bon traitement aux malades sans ressources réside dans un partenariat public-privé.


Marcel Schüpbach n'a qu'un regret : il n'a pas reçu l'autorisation de filmer en Inde, et la plupart des images viennent du Malawi, ce qui crée un déséquilibre dans le traitement du sujet. Paradoxalement, Novartis, d'habitude peu enclin à s'ouvrir aux journalistes, a cette fois accepté de participer à ce tournage.

Fanny Le Borgne

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